Bien que la technique soit très compliquée, la théorie en elle-même est dans son principe assez simple: il s'agit d'introduire dans la chaîne d'ADN (F1)(F2)(S1)(E2) d'une cellule, le géne, c'est-à-dire un petit morceau d'une autre chaîne commandant la tâche précise que l'on veut faire exécuter par la cellule manipulée. Le code génétique étant universel, il est possible d'introduire par exemple des gènes humains dans une bactérie. On peut ainsi amener une bactérie ordinaire à fabriquer des substances extrêmement complexes et très rares - par exemple de l'insuline ou de l'interféron.
Mais pourquoi une bactérie?
Tout simplement parce que les bactéries sont généralement aisées à cultiver et que leur temps de division est très rapide. Une culture bactérienne peut atteindre des densités très élevées, contrairement aux cellules végétales et mammaliennes.
De plus, la génétique de certaines bactéries, comme Escherichia Coli, est bien connue et le chromosome, plus simple, des bactéries permet une manipulation plus aisée. D'où l'intérêt de transmettre certaines propriétés de cellules "supérieures" à des micro-organismes tels des bactéries qui vont se reproduire intensivement et indéfiniment devenant ainsi de véritables usines.
Les Bactéries, organismes unicellulaires appartenant au règne des protistes, subissent des attaques de parasites, tout comme les plantes, les animaux et l’homme. Les parasites bactériens sont appelés bactériophages (littéralement « mangeurs de Bactéries ») ou simplement phages.
Au cours des années 70, on découvrit que certains phages ne réussissent à attaquer efficacement que les Bactéries appartenant à la souche sur laquelle ils se sont développés durant la génération précédente. Ce phénomène ne pouvait pas être interprété par l’apparition de mutations, car si les phages s’étaient développés alternativement sur deux souches d’Escherichia coli, ils acquéraient à chaque génération l'aptitude à attaquer la dernière souche parasitée, mais ils oubliaient mystérieusement la façon d’attaquer la souche précédente. Ces observations furent enfin expliquées par la découverte des enzymes de restriction (F2)(F3)(I1). Ces enzymes constituent de véritables défenses antivirales qui aident la Bactérie à survivre à l’attaque des phages.
Une enzyme de restriction typique est capable de reconnaître une séquence d’ADN spécifique en palindrome, et de la couper. L’ADN du phage est donc coupé par les enzymes de restriction, et il ne peut donner naissance à de nouveaux phages.
Pourquoi l’enzyme de restriction ne coupe-t-elle pas l’ADN de la Bactérie, commettant de cette façon une sorte de suicide cellulaire ? L’ADN de chaque souche de Bactéries est protégé par un processus de modification chimique spécial (méthylation), précisément dans les zones qui seraient coupées par l’enzyme. Lorsque l’enzyme rencontre les zones méthylées, elle laisse l’ADN intact. Chaque souche bactérienne possède un modèle de méthylation spécifique dont héritent les générations de Bactéries suivantes. Les quelques phages à même de survivre et de se reproduire dans ces conditions, héritent du modèle de méthylation de la Bactérie qu’ils ont réussi à infecter, et sont donc protégés contres les attaques éventuelles des enzymes de restriction de la même souche bactérienne, du moins tant qu'ils continuent à se développer sur cette souche. Lorsqu’ils en envahissent une autre, ils acquièrent le modèle de méthylation de la nouvelle souche, perdant en même temps le modèle de la première souche.