- LES FABLES ET L'ACTUALITÉ
La Fontaine, souvent présenté comme un rêveur et un distrait, st, à son siècle, un des écrivains qui ont le plus puisé dans l'actualité. Il connaît à fond le vocabulaire technique de la chasse; il évoque le luxe des équipages (IV,13), les particolarités de l'étiquette de cour (VIII,14); il souligne l'ignorance des magistrats qui achètent leur charge (IV,14).
Certaines fables paraissent viser des événements précis de la vie contemporaine, les entreprises aventureuses des Compagnies des Indes[I 1], [F1],[F2], [Es 1],[E1], (IV,2; V,13;XII,7) ou les fondations philanthropiques de la compagnie du Saint-Sacrement (XII,27) que Molière a évoqué pour l'attaquer dans Tartuffe[I1], [I 2], [F 1], [F 2], [E 1], [Es 1].
Mais surtout il y a dans une vingtaine de fables , des allusions probables à la politique royale. Les fables sont écrites au moment où Louis XIV, revendiquant sa part de la succession d'Espagne, s'empare de la Franche-Compté[F 1], [F 2], [E 1],[E 2][I1], [Es 1] et se heurte à la Triple Alliance des Hollandais, Anglais et Suédois, qui lui imposent leur médiation (Paix d'Aix-la-Chapelle, 1668). Tous les efforts de Louis XIV tendirent alors à dissocier l'alliance pour isoler la Hollande, qu'il envahit en 1672. Mais, dès 1673, Guillaume d'Orange[F 1], [I 1], [Es 1], [E 1] parvint à former une nouvelle coalition qui obtint la paix de Nimègue (1678).
DES IDÉES POLITIQUES EN VERS
On admet généralement que La Fontaine se moque des plaintes insupportables de la Hollande (Le Soleil et les Grenouilles) et lui montre l'avantage de se fier à un protecteur puissant (VIII,18) plutôt que de s'en remettre à une coalition ridicule (La Ligue des Rats). Il met en garde les Anglais contre les erreurs de l'état populaire qui a décidé d'abandonner Louis XIV (VII,17); il leur signale le danger de s'attaquer au Lion (XI,1); il les encourage à rester au moins dans la neutralité (VII,18) et s'adresse à l'ambassadeur de Francepour qu'il les dissuade de s'unir à l' « hydre » de la coalition (VIII,4).
C'est surtout dans les derniers livres qu'apparaît, à côté de l'éloge de la paix (VII,18), cet aspect inattendu d'un La Fontaine au service de la politique royale.
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